La criée au port de Royan, une histoire ancienne

Pêchés à la ligne ou capturés au filet, la sole, le maigre et le bar terminent leur course quai des Sabliers au port de Royan. Ici se dresse la halle à marée, plus communément appelée criée de Royan, lieu d’enchères fréquenté par les grossistes et poissonniers. Ils viennent y faire provision de marchandises saisies au large et fraîchement débarquées au port. Dans la salle de vente, les « cris » d’autrefois se sont éteints. Le clapotis des touches d’ordinateurs et la lumière rouge des afficheurs électroniques les ont remplacés.

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À la criée, n’entre pas qui veut. Seuls les professionnels, acheteurs ou vendeurs, dûment agréés par les services vétérinaires y ont droit de cité. Cette réglementation très sélective en fait un lieu à part, presque secret. Ici, la loi du marché, au sens le plus littéral du terme, fait son œuvre au gré des arrivages de nourritures marines.

La première criée de la station a lieu en 1875. À l’époque, ces enchères endiablées sur la bonne chère se déroulent sous les voûtes du bassin de plaisance. Dans le brouhaha et les secousses du négoce, les commerces de Royan préparent et cuisinent parfois les produits prélevés au large ou près des côtes afin de les servir en direct aux consommateurs du cru.

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Un siècle plus tard, l’activité est transférée à l’avant-poste du port, quai des Sabliers. On édifie un bâtiment spécifique d’après les plans modernistes de l’architecte local Marc Quentin. Sur cette plateforme technique, transite chaque année un volume moyen de 700 à 1 000 tonnes de poissons. Une trentaine de bateaux, fileyeurs et ligneurs partent à la semaine. D’un côté, certains vont piéger la sole ou le bar dans leurs trémails pour certains. Les autres renouvellent chaque jour leur artillerie d’hameçons qu’ils immergent pour bluffer les espèces carnassières : raies, maigres, et autres dorades.

Le silence de la mer à la criée de Royan

De retour au port, les pêcheurs déchargent leur cargaison quai des Sabliers. Ils la passent ensuite à la trieuse afin de faciliter la constitution des futurs lots à mettre sur le marché. La machine réceptionne les poissons dits plats ou pleuronectiformes, comme les turbots et les barbues. Un traitement particulier est réservé aux soles. Une calibreuse spécifique permet de les ordonner en fonction de leur gabarit. Le mécanisme distingue même jusqu’à six catégories de tailles différentes ! La marchandise est ensuite entreposée dans une chambre de confinement. Là, au contact d’un rideau d’eau froide vaporisée en permanence, la « chair » du poisson bénéficie d’une meilleure conservation qu’avec de la glace.

Les lundi, mercredi et vendredi sont les jours de vente proprement dits. Les lots circulent dans des bacs devant des acheteurs. Ils enchérissent en silence depuis un bouton relié à un système informatique. Les prix s’affichent et défilent en hauteur sur des écrans digitaux. Ce rituel, beaucoup plus discret et feutré qu’auparavant, n’est que la partie visible d’un immense iceberg. Au moins 70% des transactions se font dorénavant au même moment via internet, par des marchands qui opèrent à distance et ne se déplacent pas jusqu’en Charente-Maritime.

Une démarche qualité pour les poissons de ligne

Rappelons qu’à Royan, le poisson vendu à la criée est réputé plus cher qu’ailleurs. Selon la tradition locale, les professionnels du secteur misent sur les espèces nobles. À partir de normes de pêche et de conservation établies par un strict cahier des charges, ils font primer la qualité sur le volume. Cela fait donc grimper les tarifs lorsque la demande est forte. Cette démarche se matérialise par la pose d’un pin’s numéroté sur les produits. Il représente un gage de leur traçabilité au moment de leur mise sur le marché. Ces mesures font aujourd’hui la renommée du bar de ligne commercialisé à Royan. Mais le maigre, la dorade (grise et royale), le merlan ou le sar commun sont également trois espèces référencées sous la marque « Signé Poitou-Charentes ».

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